La responsabilité des patrons

Responsabilité à l’égard de la société et des associés (responsabilité interne) :

Les textes prévoient essentiellement une responsabilité à raison des fautes commises dans la gestion de la société. Hormis le cas de faute de gestion les dirigeants peuvent également engager leur responsabilité pour avoir enfreint des dispositions légales ou réglementaires relatives au fonctionnement de la société (exemple : communication des informations lors des assemblées générales). Enfin il y a la responsabilité liée à la violation des statuts. Le fait d’avoir contracté pour le compte de la société un emprunt dont le montant impliqué dans les statuts nécessite une délibération préalable de l’assemblée.

La faute de gestion peut aller de la simple négligence aux manœuvres frauduleuses. Par exemple un administrateur de SA commet une faute de gestion en s’abstenant sans intention frauduleuse de dénoncer les agissements frauduleux du président.
– Le défaut de surveillance. Par exemple un cogérant qui laisse la trésorerie sans surveillance à la disposition de l’autre cogérant, ce dernier ayant détourné les fonds au profit de sa propre entreprise, constitue une faute de gestion.
– La négligence. Par exemple le fait de ne pas avoir souscrit d’assurance pour les dommages causés à des tiers par un véhicule de la société.
– Le défaut de consultation des associés. Par exemple le fait pour un gérant de diriger la société sana jamais consulter l’assemblée et de fixer seul sa rémunération.
Le seul fait que la société obtienne des résultats mauvais ne démontre pas la faute de gestion, en effet selon la jurisprudence il faut que les mauvais résultats soient liés par exemple au désintérêt du dirigeant pour les affaires sociales.

Lorsque le dirigeant est seul à gérer la responsabilité du dirigeant est souvent individuelle, lorsqu’il y a plusieurs dirigeants la solidarité peut être doit individuelle (lorsque la faute peut être imputée à un dirigeant et à lui seul) soit solidaire. En revanche la responsabilité sera solidaire lorsque la faute est commune à tous les dirigeants, c’est fréquemment le cas lorsque les dirigeants fonctionnent en collège (administrateurs de SA…), un organe collégial est un organe dans lequel aucun des membres n’a un pouvoir seul l’organe les a. Cette jurisprudence doit attirer l’attention du praticien lorsqu’on lui suggère d’intégrer dans un conseil d’administration un administrateur de paille. Le dirigeant solidairement responsable est susceptible de payer l’intégralité de la réparation du préjudice, cependant le tribunal peut lorsqu’il condamne les membres dirigeants d’un organe collégial fixer la part de chacun, il le fera souvent lorsque justement le dirigeant était de paille. Un dirigeant faisant partie d’un collège peut s’exonérer si au sein d’un conseil d’administration il n’est pas en accord avec des décisions il doit le faire savoir au conseil de manière explicite, il doit exiger que ses désaccords soient consignés dans le procès verbal du conseil d’administration. Le fait qu’un administrateur démissionne constitue une protestation suffisamment explicite pour dégager sa responsabilité, ou lorsque pour des motifs valables (sauf administrateur de paille) l’administrateur n’avait pas pu assister à la réunion incriminée.

Lorsque la faute d’un dirigeant cause un préjudice à la société l’action en réparation (action sociale) peut être engagée soit par la société elle-même soit par un ou plusieurs associés. Il faut prouver un préjudice subit par la société, une faute du dirigeant et un lien de causalité. Lorsque l’action est exercée par un ou plusieurs associés (action ut singuli) il n’y a pas de condition de détention minimale de capital pour agir, les frais de procédure restent à la charge des associés agissants pour le compte de la société. Il est possible d’entamer aussi une action individuelle, c’est le fait pour tout actionnaire ou associé une action en réparation au titre du préjudice qu’il a subit personnellement, cette action n’est recevable que si le demandeur prouve qu’il subit un préjudice distinct de celui de la société (exemples : le fait d’avoir été systématiquement tenu à l’écart des assemblées, le fait pour un administrateur d’avoir présenté des comptes inexactes empêchant un actionnaire de toucher des dividendes, en revanche est irrecevable l’action individuelle dès lors que le préjudice invoqué consiste en la perte de la valeur des titres qui n’est que la conséquence des dommages causés à la société).

La responsabilité à l’égard des tiers :

A l’égard des tiers la responsabilité ne peut être engagée que s’ils ont commis une faute détachable de leur fonction. Il en est ainsi lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales. Il a par exemple été jugé qu’avait commis une faute séparable de ses fonctions un gérant qui avait volontairement trompé un fournisseur sur la solvabilité de la société, le dirigeant qui a laissé un salarié utiliser un véhicule de la société sans l’informer qu’il n’était pas assuré. Le seul fait de commettre une infraction pénale n’est pas la preuve irréfutable que la faute n’est pas séparable sauf si le dirigeant s’est impliqué personnellement dans l’infraction, exemples : la contrefaçon de marque constitue une infraction pénale dans laquelle le dirigeant s’implique forcément personnellement, en revanche le défaut de souscription d’une police d’assurance pour une société de construction n’est pas une faute séparable. Pour l’étendue de la responsabilité (individuelle, solidaire) c’est le même régime que pour la responsabilité civile. Il convient de faire la distinction entre d’une part les dirigeants de SARL et de société par action et d’autre part les dirigeants d’autres sociétés (SNC…). Pour la SARL, SA, et SAS il y a un article L 123-22 du code de commerce qui prévoit que les dirigeants de ces sociétés sont responsables individuellement ou solidairement responsables de leurs fautes détachables, avec une prescription triennale. Concernant les autres dirigeants il n’y a pas de texte donc prescription de droit commun de 5 ans, la responsabilité est probablement solidaire.

La responsabilité dans le cadre de la loi de 2005 de sauvegarde :

Le recours aux textes de droit commun est particulièrement inefficace contre un dirigeant qui du fait d’une mauvaise gestion ou d’un comportement frauduleux prive les créanciers de la société dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire de la possibilité d’obtenir le règlement d’au moins une partie de leur créance. Pour cette raison la loi de 2005 reprenant une partie des lois précédentes a instauré une responsabilité spéciale destinée non seulement à améliorer la situation des créanciers mais aussi à sanctionner les dirigeants fautifs. La loi de 2005 a prévu trois possibilités de mettre en cause la responsabilité d’un dirigeant d’une société mise en liquidation judiciaire :
– Procédure d’extension de la liquidation : le tribunal de commerce peut sur rapport du mandataire liquidateur étendre la procédure de liquidation au patrimoine du dirigeant de droit ou de fait lorsque ce dernier a traité le patrimoine de la société comme son propre patrimoine. Dans ce cas les créanciers qui n’ont pas pu se payer sur la société pourront se payer sur celui du dirigeant fautif. Les comportements susceptibles chez un dirigeant social d’entrainer la mise en œuvre de cette procédure sont essentiellement l’abus de biens sociaux, surfacturation un loyer à sa société commercial à travers à une SCI pour rembourser un emprunt…
– Action en comblement de passif : il faut une insuffisance d’actif, il faut que dans le cadre de la liquidation judiciaire il s’avère que l’actif est insuffisant pour rembourser tous les créanciers, il faut également que cette insuffisance d’actif soit la conséquence directe d’une faute de gestion (exemples : dépôt de bilan tardif, utilisation de recourir à des moyens ruineux pour maintenir l’entreprise artificiellement en vie comme vendre des actifs
– Contribution aux dettes sociales : liste précise de comportements sanctionnés au titre de la contribution aux dettes sociales. Lorsque le dirigeant de société se rendit coupable de ces manquements limitativement énumérés le juge pouvait mettre à la charge du dirigeant tout ou partie des dettes de la société sans qu’il y ait lieu de recherche une insuffisance d’actif. Ce texte a été supprimé en 2008 par la loi LME, cette suppression est regrettable car ce texte avait été édicté pour mettre fin à des comportements inadmissibles de la part des dirigeants sociaux qui nécessitaient des sanctions pour assainir la profession commerciale. Exemple des comportements autrefois sanctionnés : le défaut de comptabilité.

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